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Du 10 octobre à la mi-novembre, ils n'y sont pour personne. Joseph, Dédé, Jean-Jacques et Jean-Marc ainsi que son jeune fils, Thomas, n'ont alors plus qu'un sanctuaire.
Un abri de jardin en bois sans permis de construire dédié à l'oiseau bleu, aux joies de sa migration, à la convivialité et aux plaisirs de la table : la palombière.
Dès que le calendrier leur offre un instant de liberté, ils se régugient dans cette cabane. Ici, le temps s'égraine à un rythme différent; celui des repas pantagruéliques, étiré, succède au temps arrêté d'un passage de palombes. Et lorsque ces dernières se posent dans les cimes qui surplombent la cabane en bois massif, le sablier s'accélère suivant le mouvement des coeurs des chasseurs.
Pendant un peu plus d'un mois, l'équipe de Joseph, qui a construit l'abri en bois il y a une quinzaine d'années avec du pétal de récupération, des fougères et des filets de camouflage, va s'y retrouver quasiment chaque jour sans discontinuité.
Placée dans les chênes, cette palombière possède une pièce à vivre de 8 m par 4, deux postes de guet et pas moins de 115 m de tunnels qui permettent de se déplacer à travers toute la surface boisée.
"Les palombes qui séjournent chez nous sont des rôdeuses qui font le va-et-vient, d'une chênaie à l'autre, en quête de nourriture.
Alors il n'est pas nécessaire de se lever à l'aube comme sur les sites de grands passages pour tenter de les intercepter. Nous débutons la chasse vers 9 heures, suivant un rythme immuable", précise Joseph au volant de son véhicule tout-terrain "porte-palombes". Les appeaux, peu émus en apparence par l'étonnant attelage, se tiennent calmement au garde-à-vous, prêts à être mis en place, peu importe les intempéries.
Comme les palombes se posent toujours face au vent et que celui-ci souffle aujourd'hui en provenance du nord-est, les appeaux seront placés au niveau du poste de guet sud. Une demi-douzaine d'entre eux, munis d'un casque pour les appaiser, sera fixée sur les balanciers au sol.
Dans les chênes, sur les papillonneuses et les glaneuses, les appeaux doivent impérativemnt ouvrir leurs ailes tout en douceur pour imiter les palombes qui se nourrissent de glands.
On n'y place donc que des palombes calmes, élevées à la main.
Ces dernières, les bien nommées "aimables", ne sont pas casquées. "Sans quoi, les palombes sauvages, qui détecent aisémént l'artifice, refusent de se poser", explique Joseph.
Les appeaux en place, tout le monde rentre dans la palombière. L'espace est confortable, un vrai peiti chalet !
Les Gascons savent prendre soin d'eux, et un feu est vite allumé. De la ventrèche grillée pour le petit déjeuner, ça commence bien, non ?
La "légère" collation achevée, tout le monde rejoint le poste de guet et scrute le ciel dans l'attente d'un pasage. L'exiguîté du lieu incite à la palabre, aux discussions enflammées et aux blagues. Ca discute et ça chahute dans une ambiance festive. Mais dès que les voliers d'oiseaux bleus se dessinenet à l'horizon, les visages se font graves et le silence de plomb.
Dans la plus grande discrétion, chacun sait ce qu'il a à faire : d'abord jouer avec les câbles reliés aux balanciers placés au sol pour faire voleter les appeaux casqués et attirer l'oeil des palombes volantes.
Puis une fois le vol dévié, c'est au tour des papillonneuses et des glaneuses d'être sollicitées pour inciter les palombes à se poser sur la chênaie.
Les oiseaux une fois branchés, il ne reste plus qu'à approcher en silence par les tunnels au plus près du lieu de pose et à se synchroniser pour faire feu, chacun visant un oiseau différent.
A midi, les palombes ont un instant de répit pendant l'heure et demie du repas, qui parfois se prolonge...
La palombière se transforme alors en abri de bois / Auberge des trésors culinaires du terroir, et Dieu sait que le coin en recèle ; du foi gras, aux cèpes avant de conclure par la traditionnelle croustade à l'armagnac, arrosée de floc de Gascogne.
"Outre la chasse, notre plaisir est aussi de se retrouver, de vivre ensemble autour d'un bon repas, mais aussi de partager nos passions, en invitant des amis. La palombière est avant tout un lieu d'échange !" isnite Joseph.
Le repas achevé, dans une douce torpeur, chacun reprend son poste, les regards cherchant les palombes sur la ligne d'horizon.
Les voliers se multiplient jusqu'à ce que l'un d'eaux dévie. Recommence alors le bal des appeaux, aux sols et sur les cimes.
Une sauvage séduite par le mortel ballet, décroche et vient se brancher à l'autre bout du bosquet. Un des tireurs approche à pas de loup, dissimulé par le tunnel, monte précautionneusement le fusil à l'épaule. Une détonation claque, et l'oiseau bascule.
C'est Thomas, le cadet du groupe qui a l'honneur de récupérer le bel oiseau aux reflets bleus et à la gorge rosée. Lorsqu'il revient vers la palombière l'oeil brillant et l'oiseau en main, nous ne pouvons pas nous empêcher de penser qu'il tient là un relais symbolique porteur d'espoir : celui qui, de père en fils, voit se transmettre une passion inféodée au Sud-Ouest, où l'on célèbre, comme nulle part ailleurs, le bien-vivre, la chasse et, cela va de soi, l'amour immodéré de la palombe ! La vrae vie, en somme !
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